La substance chimique éternelle TFA même dans l’eau minérale – Le Luxembourg doit soutenir la proposition de la Commission européenne d’interdire les pesticides à cause du TFA, ce
mercredi 4 décembre

La substance chimique éternelle TFA a envahi notre environnement sans obstacle. Produit de dégradation de diverses substances synthétiques (principalement des pesticides et des réfrigérants), petite, mobile et résistante, elle s’est infiltrée jusque dans notre ressource la plus précieuse : l’eau.

Les rivières, les sources, les eaux souterraines et maintenant – comme le montre le récent rapport du Pesticide Action Network Europe (PAN Europe), auquel le Mouvement Écologique a également contribué[i] – même l’eau en bouteille, supposée si pure : des analyses d’eau minérale en bouteille provenant de toute l’Europe révèlent des contaminations par le trifluoroacétate (TFA).

Plus de 50 % de la contamination de l’environnement par le TFA provient de l’utilisation des pesticides PFAS. Les substances actives des pesticides, comme le flufénacet et le flutolanil, présents dans de nombreux pesticides, sont identifiées comme les principales sources de TFA.

Sur proposition de la Commission européenne, ces substances toxiques devraient désormais perdre leur autorisation. Les 4 et 5 décembre 2024, cette proposition essentielle sera soumise au Comité permanent des plantes, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux (SCoPAFF).

Le Mouvement Écologique appelle les représentants luxembourgeois dans ce comité à soutenir fermement l’interdiction de ces substances toxiques.

 

10 sur 19 eaux minérales contaminées par le TFA

Le TFA est désormais présent dans tous les types d’eau. Après avoir révélé en juillet, dans le cadre de la campagne européenne de PAN Europe, que les eaux de surface ainsi que les eaux souterraines étaient contaminées[ii], les analyses d’eaux minérales en bouteille sont désormais disponibles.[iii]

Dans 10 des 19 marques d’eau minérale analysées, le TFA a pénétré les réservoirs d’eau souterraine souvent situés à plusieurs centaines de mètres de profondeur, supposés être protégés des polluants anthropiques, et qui servent de source à nos eaux minérales. Dans 7 des 19 cas, la contamination par le TFA dépasse la limite de 0,1 µg/L (100 ng/L) fixée pour les métabolites pertinents de pesticides dans l’eau potable.

L’échantillon d’eau minérale luxembourgeoise était également contaminé[iv]: environ 400 nanogrammes de TFA par litre ont été détectés. L’eau minérale luxembourgeoise se situe ainsi dans la moyenne. Certaines eaux minérales étrangères ne présentaient aucune trace de TFA, tandis que d’autres affichaient des concentrations nettement plus élevées (jusqu’à 3 200 ng/L) (voir graphique).

Dans ce graphique, les 10 eaux minérales contaminées par des résidus quantifiables de TFA sont listées par ordre alphabétique, ainsi que les 7 eaux minérales et 2 eaux de source qui ne montrent aucune contamination quantifiable par le TFA. Les barres bleues représentent les résultats des premières analyses effectuées en été, et les barres bleu clair ceux des analyses de confirmation réalisées à l’automne 2024. Source : PAN Europe/Global 2000

* Dans ces cas, il ne s’agit pas d’eau minérale, mais d’eau de source. Selon la directive 2009/54/CE, les exigences relatives à la composition et à la pureté de l’eau de source sont moins strictes que celles pour l’eau minérale.
** La marque concernée du Luxembourg a été anonymisée à la demande de l’organisation environnementale luxembourgeoise Mouvement Écologique, qui avait commandé cette enquête. Étant donné le nombre limité de producteurs d’eau minérale au Luxembourg, le Mouvement Écologique estime que la divulgation du nom de la marque pourrait concentrer l’attention de manière excessive sur ce seul fabricant, au lieu de mettre en lumière le problème global. Les autorités compétentes au Luxembourg ont été informées de la marque concernée. Pour toute question, veuillez contacter Claire Wolff, Mouvement Écologique, claire.wolff@oeko.lu.

 

Il est inquiétant de constater qu’il est désormais clairement établi que l’eau minérale en bouteille est également contaminée par la substance chimique éternelle. Cela est d’autant plus problématique que les consommateurs supposent qu’il s’agit d’un produit « naturel » et « pur ». En effet, pour qu’une eau puisse porter l’appellation « eau minérale », certaines règles et critères de qualité doivent être respectés : par exemple, les procédés de filtration pour la purification sont interdits, et l’eau mise en bouteille doit être exempte de contamination dès l’origine. En dehors du fait que le TFA est très coûteux et inefficace à filtrer, un tel procédé ne serait donc de toute façon pas envisageable pour l’eau minérale.

Avec cette analyse, les embouteilleurs d’eau minérale, tout comme les fournisseurs d’eau publique, se retrouvent face à un nouveau défi : ils doivent s’engager davantage pour protéger les sources d’eau qu’ils utilisent contre de nouvelles contaminations. En règle générale, ils disposent de moyens limités pour garantir eux-mêmes la protection de leurs ressources en eau et dépendent des mesures prises par les autorités compétentes pour préserver durablement la pureté de notre eau potable. Cependant, ils ne doivent pas rester passifs face à cette situation : ils doivent faire entendre leur voix dans l’intérêt de leurs clients (et, par conséquent, dans leur propre intérêt).

 

Préoccupations sanitaires – même si les effets détaillés doivent encore être examinés, le principe de précaution doit prévaloir !

Selon les connaissances actuelles, toutes les eaux minérales analysées – même celle avec la concentration la plus élevée mesurée, soit 3 200 ng/L – respectent les valeurs sanitaires de référence fixées dans l’UE pour un adulte. Mais le problème réside justement dans les limites de ces connaissances. Notamment en raison de la pression accrue exercée sur la politique ces derniers mois – y compris par PAN Europe – l’effet du TFA sur la santé humaine est actuellement étudié de manière approfondie par l’OMS, avec des résultats attendus pour la fin de 2025.[v]

Cependant, un soupçon de toxicité pour la reproduction existe déjà, comme l’a signalé le producteur chimique Bayer.[vi] Le TFA devrait donc déjà être considéré comme un « métabolite toxicologiquement pertinent », c’est-à-dire un produit de dégradation toxique. Selon la législation européenne, une valeur limite uniforme de 0,1 µg/L s’applique à ces substances dans les eaux souterraines et l’eau potable. Mais cette limite est largement dépassée.

Chaque jour supplémentaire où le TFA continue de pénétrer sans restriction dans nos cours d’eau augmente le risque que des seuils pertinents pour la santé soient dépassés. Il est donc impératif d’agir dès maintenant, par précaution, et de stopper l’introduction de substances précurseurs de TFA dans notre environnement.

 

 Toujours: l’eau du robinet est préférable à l’eau en bouteille !

La teneur moyenne en TFA des eaux minérales analysées se situe dans une plage similaire à celle de l’eau du robinet (par rapport à la valeur de référence fixée par le gouvernement de 12 000 ng/l). En termes d’impact environnemental, comme les émissions de CO2 liées au transport ou les matériaux d’emballage, l’eau du robinet reste une solution plus durable que l’eau en bouteille.

 

Stopper l’entrée du TFA dans l’environnement, interdire les pesticides PFAS dès maintenant !

Ces découvertes ne doivent pas provoquer de panique, mais au contraire éveiller les consciences et inciter à une action rapide : conformément au principe de précaution, toute nouvelle entrée de TFA dans l’environnement doit être évitée dès maintenant ! C’est ainsi que nous pourrons encore boire notre eau dans dix ans.

La première mesure doit être l’interdiction des principaux responsables : les pesticides PFAS utilisés en agriculture, qui se décomposent en TFA. C’est principalement de cette manière que le TFA pénètre dans l’environnement.

Les 4 et 5 décembre, la Commission européenne proposera, lors du Comité permanent des plantes, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux (SCoPAFF), de retirer l’autorisation des substances actives Flufénacet et Flutolanil. Ces substances appartiennent au groupe des pesticides PFAS, identifiés par l’Agence allemande de l’environnement (UBA) comme la principale source de contamination par le TFA des ressources européennes en eaux souterraines et potables.[vii]

L’interdiction de ces substances est donc une nécessité légale : les pesticides dont les résidus (dans ce cas, le TFA) sont présents dans l’eau et les aliments, et qui sont suspectés d’effets nocifs sur la santé, ne respectent pas les critères d’autorisation de la réglementation européenne sur les pesticides.

Cette réunion représente une occasion décisive d’agir dans le meilleur intérêt des citoyens européens, en particulier des groupes vulnérables – tels que les enfants – et de l’environnement. Les pesticides qui contaminent notre eau – la base de toute vie sur cette planète – avec une substance chimique toxique pour la reproduction de manière irréversible et généralisée doivent être interdits.

Le réseau d’action sur les pesticides PAN Europe, en collaboration avec le Mouvement Écologique, appelle donc les États membres à :

  • Interdire les pesticides PFAS : Les États membres, y compris le Luxembourg, doivent approuver cette semaine l’interdiction proposée pour le Flufénacet et le Flutolanil et la mettre en œuvre immédiatement.
  • Soutenir une agriculture respectueuse de l’environnement : Les pesticides PFAS ne doivent pas être remplacés par d’autres substances toxiques. Les agriculteurs doivent recevoir un soutien technique et financier adéquat pour passer à des méthodes plus respectueuses de l’environnement.
  • Adapter la directive-cadre européenne sur l’eau potable : Il est nécessaire d’établir une limite pour le TFA dans l’eau potable, basée sur les dernières avancées scientifiques, permettant une définition de seuil à l’échelle européenne.
  • Réviser la directive-cadre européenne sur l’eau : Des réunions clés sont prévues fin 2024 pour définir des normes de qualité pour le TFA dans les eaux naturelles.
  • Publier les résultats des analyses : Les États devraient publier régulièrement les analyses des échantillons d’eau potable ainsi que celles des eaux minérales en bouteille.
  • Protéger largement les sources d’eau : Comme le montre la contamination des eaux minérales en bouteille, une protection étendue de nos ressources en eau potable est nécessaire. Un débat de fond sur l’optimisation de cette protection doit être engagé.
  • Limiter l’utilisation de diverses substances chimiques au niveau européen : Le Luxembourg devrait jouer un rôle moteur pour interdire, au niveau de l’UE, les substances chimiques liées au TFA (réfrigérants, cosmétiques, revêtements de poêles, etc.).
  • Assurer une sensibilisation générale : L’État doit garantir la mise en place d’une campagne d’information active pour sensibiliser les consommateurs aux moyens de se protéger contre les contaminations par le TFA.

 

Contact:

Claire Wolff, Mouvement Ecologique; claire.wolff@oeko.lu; +352 43 90 30 35

 

[1] Pressrelease PAN Europe from 03.12.2024: Forever Chemical Found Even in Pristine Mineral Waters. https://www.pan-europe.info/press-releases/2024/12/forever-chemical-found-even-pristine-mineral-waters (consulté le 03.12.2024)
[1] https://www.meco.lu/de/blog/documentcenter/ewigkeitschemikalie-tfa-auch-im-trinkwasser-noch-ist-kein-grund-zur-panik-aber-die-politik-muss-sofort-handeln/
[1] PAN Europe : TFA: The ‘Forever Chemical’ in European Mineral Waters: https://www.pan-europe.info/resources/briefings/2024/12/tfa-%E2%80%98forever-chemical%E2%80%99-european-mineral-waters (consulté le 03.12.2024)
[1] Le Mouvement Écologique souhaite garder la marque anonymisée, car – compte tenu du fait qu’un seul échantillon a été prélevé et du nombre très limité de producteurs d’eau minérale dans le petit Luxembourg – cela risquerait de focaliser excessivement l’attention sur ce seul producteur. Or, la contamination par le TFA est un problème général, et outre la responsabilité des producteurs, c’est avant tout au gouvernement d’agir !
[1] https://environnement.public.lu/fr/support/faqs/waasser.html (consulté le 27.11.2024)
[1] https://www.global2000.at/news/tfa-rechtsgutachten (consulté le 27.11.2024)
[1] https://www.umweltbundesamt.de/sites/default/files/medien/11850/publikationen/102_2023_texte_tfa.pdf (consulté le 02.12.2024)

Vous trouverez ici des informations supplémentaires sur les rapports précédents concernant le TFA dans nos eaux de surface, souterraines et potables, ainsi que des informations générales sur le TFA et les PFAS (D’où proviennent-ils et comment les éviter ?)

 

TFA dans les eaux de surface et souterraines au Luxembourg

Cet été, le Mouvement Écologique a déjà signalé la contamination des cours d’eau par le TFA, dans le cadre de l’étude paneuropéenne de PAN Europe. Des échantillons ont été prélevés au Luxembourg, notamment dans la rivière Alzette, une source à Dommeldange et l’eau du robinet dans une commune. Tous les échantillons présentaient des niveaux de contamination correspondant à la moyenne des échantillons des autres pays.

Les rapports et revendications associés du Mouvement Écologique sont disponibles ici (communiqué de presse sur le TFA dans les eaux de surface) et ici (communiqué de presse sur le TFA dans les eaux souterraines). Vous trouverez également ici les réactions des trois ministères de l’Environnement, de la Santé et de l’Agriculture à ces publications, ainsi que des informations sur la manière dont ils comptent procéder.

 

Qu’est-ce que le TFA ? Et les PFAS ?

Le TFA fait partie du groupe chimique des PFAS, une vaste famille qui comprend jusqu’à 10 000 substances. Elles sont toutes synthétiques, extrêmement durables et mobiles. Certaines d’entre elles se sont révélées toxiques pour l’homme. Une fois introduites dans l’environnement, elles y restent indéfiniment en raison de leur grande stabilité. Elles ne peuvent être ni filtrées ni détruites, d’où leur surnom de « produits chimiques éternels. »

Les PFAS sont utilisés dans de nombreux domaines pour leurs propriétés hydrofuges, antitaches et anti-graisses. Par exemple, on les retrouve dans des produits de consommation comme les poêles antiadhésives, les vestes imperméables, les boîtes à pizza ou les fils dentaires. Ils sont également largement utilisés dans les médicaments et les pesticides employés en agriculture conventionnelle. De plus, les PFAS sont utilisés dans les mousses extinctrices et comme fluides réfrigérants.

Cependant, comme il a été prouvé que plus de 50 % de TFA dans l’eau provient des pesticides utilisés en agriculture, et que l’eau est une ressource alimentaire essentielle, le Mouvement Écologique ainsi que ses organisations partenaires européennes mettent l’accent sur ce problème.

Pour plus de détails et des réponses aux questions fréquentes sur les PFAS, consultez ce document : BUND Informations PFAS.

 

Le TFA sous-estimé – Déjà problématique ou une menace future ?

Le TFA, en tant que substance PFAS, est en réalité le dernier produit de dégradation de divers composés PFAS plus importants. C’est aussi une molécule très persistante qui perdure dans l’environnement. Le TFA pénètre dans l’eau principalement par les pesticides à base de PFAS. Lorsqu’ils sont utilisés en agriculture, ces produits chimiques pénètrent dans le sol et peuvent être lessivés vers les eaux de surface et souterraines. Ce problème a largement été ignoré jusqu’à présent, ce qui explique l’absence de seuils pour le TFA dans la directive sur l’eau potable et la réglementation des pesticides.

Aujourd’hui, presque tout l’environnement est contaminé par le TFA, avec des conséquences encore incertaines.

L’étude de PAN Europe attire enfin l’attention nécessaire sur cette molécule sous-estimée, permettant ainsi d’agir.

Cependant, les organisations environnementales notent également que d’autres substances PFAS sont insuffisamment réglementées. En raison de leur durabilité et de la toxicité prouvée de divers composés PFAS, les autorités d’Allemagne, des Pays-Bas, de Norvège, de Suède et du Danemark ont appelé à des restrictions sur ces produits chimiques éternels. Lisez ici la déclaration du BUND Allemagne à ce sujet (en allemand).

 

À quel point le TFA et les PFAS sont-ils nocifs ?[i]

On sait encore très peu de choses sur les effets du TFA. D’autres produits chimiques éternels bien étudiés sont associés à des perturbations hormonales, des problèmes de fertilité, des malformations, des atteintes au système immunitaire et un risque accru de cancer. Plus de 20 % des enfants présentent déjà des concentrations de PFAS dans leur corps dépassant les seuils de sécurité sanitaire. On soupçonne que le TFA est reprotoxique.

 

Peut-on encore boire l’eau du robinet en toute sécurité ?[ii]

Oui ! Cependant, il faut agir maintenant pour garantir que l’eau du robinet reste potable dans 10 à 20 ans. La contamination par le TFA dans l’eau potable augmente chaque jour en raison de l’utilisation de pesticides PFAS et de réfrigérants (« gaz F »). La marge de sécurité diminue, et les risques pour la santé augmentent.

 

Comment éviter les PFAS au quotidien ?

En tant que consommateur, vous pouvez réduire votre exposition aux PFAS en adoptant des gestes conscients. Par exemple, utilisez des cosmétiques sans PFAS, évitez les poêles antiadhésives et choisissez des vêtements d’extérieur exempts de ces produits chimiques.

Le BUND Allemagne propose des conseils utiles (an allemand) :

 

 

[i]https://environnement.public.lu/fr/support/faqs/waasser.html (aufgerufen am 27.11.2024)
[ii] https://www.global2000.at/news/tfa-rechtsgutachten (aufgerufen am 27.11.2024)
[iii] Global2000, https://www.global2000.at/publikationen/tfa-im-trinkwasser (aufgerufen am 27.11.2024)
[iv] Global2000, https://www.global2000.at/publikationen/tfa-im-trinkwasser (aufgerufen am 27.11.2024)

03.12.24